L’histoire du Manoir de La Chalotais

Denis Bahon vous raconte l’histoire du Manoir de La Chalotais.
MANOIRCHALOTAIS220513aAutant le Manoir de Bourgchevreuil est repérable et connu, autant le Manoir de la Chalotais est plus confiné dans son écrin de verdure sous les frondaisons de son Parc.
Il m’est même arrivé dans l’accueil de la Mairie d’entendre des visiteurs demander où se trouvait ce Manoir. Et quand la réponse est donnée, le visage du demandeur reflète l’hésitation entre plaisanterie et incompréhension.Pourtant, de nombreux mariages y sont célébrés depuis 1974 d’abord dans l’ancienne cuisine du Manoir à droite de la façade, puis dans l’ancienne salle du Conseil Municipal s’ouvrant à l’Ouest sur le Parc.
MANOIRCHALOTAIS220513dCertes il a subi d’importantes extensions lors de l’installation de la Mairie.
Mais son histoire mérite d’être contée pour mettre en valeur tout son intérêt patrimonial.

Pocquet du Haut-Jussé, dans son ouvrage « visites et excursions à Rennes et aux alentours », édité en 1974, « lui trouve un air de gentilhommière qui a conservé le charme d’antan avec une rare fidélité ».
Certes, on n’est pas sûr de la date de sa construction car il a encore des aspects médiévaux : La porte en plein cintre, la fenêtre ornée d’une grille en fer forgée sur l’avant droit, la tour carrée à l’arrière de la façade qui contient un escalier tournant, et prolongée d’une galerie en bois en arcades qui semble plaquée sur la façade nord. En entrant par la porte en plein cintre, on remarque sur la droite une grande cheminée de pierres et en face une sorte d’étagère de pierre abritée dans une niche qui servait de desserte.

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Ces éléments permettent à Pocquet du Haut Jussé de parler « d’ambiance médiévale ».
Il peut, dit-il, dater l’ensemble du XVI°siècle.
La première mention du manoir est citée en 1540 lors du mariage de Nicole de l’Espine avec Sebastien Caradeuc de la Jouaisnerie, Procureur au Parlement de Bretagne. Dans sa corbeille de mariage elle apportait ce domaine de la Chalotais aux Caradeuc. (Pocquet dans sa biographie parle de « noble homme », qui indiquait une extraction de haute bourgeoisie et non de noblesse. La mention d’écuyer plus valorisante apparut très tôt à la suite d’une histoire de falsification des actes de naissance de 1601 et de 1606.).
Ses héritiers accolèrent le nom de la Chalotais à celui de Caradeuc et le conservèrent même après la vente du domaine en 1698 à la famille Olivier des Brulais, soit 3 ans avant la naissance du fameux procureur général Louis -René Caradeuc de la Chalotais.

Si bien que c’est souvent à tort que ceux qui ont écrit sur ce Manoir se sentent obligés de parler du Procureur général, laissant ainsi de côté les autres propriétaires successifs.

La famille des Olivier des Brulais en 1698, lors de l’acquisition du Manoir, est une famille moins connue, qui répugne à accoler à leur patronyme le nom du Domaine. Pourtant au décès de son père Claude le 25 Mars 1703, son fils et héritier Pierre-Mathurin était Procureur fiscal de plusieurs juridictions. Il laissa une nombreuse descendance. Il faut citer notamment celui qui épousa en 1780 Jeanne-Marie-Perrine, Demoiselle de Déserseul, une des filles de Jean-Mathurin, à savoir Joseph-Mathurin Malherbe personnage célèbre de la Révolution. Né à Rennes le 20 Octobre 1758, ancien Avocat au Parlement de Bretagne, il appartenait à une famille de la Haute Bourgeoisie. Au cours de l’été 1790, au premier renouvellement de la Municipalité de Rennes, au 2ème tour de scrutin, l’Assemblée électorale le promut procureur de la commune de Rennes. Il se lia d’amitié avec Lanjuinais et devint en Ille et Vilaine l’un des chefs de la résistance aux Montagnards. René Bricaud dans son ouvrage sur l’Administration d’Ille et Vilaine en 1790, 1791 parle de lui comme « un homme désintéressé et droit qui avait mis son talent au service de l’œuvre de rénovation ». Le sinistre Carrier, lors de son épuration à Rennes, le fit emprisonner. Le coup d’état du 9 Thermidor lui permit d’échapper à la guillotine. Élu, le 27 germinal an VII, député d’Ille et Vilaine au conseil des Cinq Cents, rallié au coup d’Etat du 18 Brumaire et nommé, le 4 Nivôse an VIII, membre du Tribunat, il fut secrétaire de cette assemblée en l’an IX et l’an X, membre de la section de législation, et, comme tel, concourut à la rédaction du Code Civil. Puis Conseiller Impérial, Président de la Cour d’Appel de Rennes, représentant à la Chambre des 100 Jours, Conseiller Royal sous la deuxième restauration, etc…Sa biographie est inépuisable.

Les Olivier des brulais vendirent la propriété vers 1840 à Monsieur Aubrée. Puis le Domaine passa ensuite à Alexandre Richou, Avoué à Angers. Son épouse était la petite fille de l’Académicien René Bazin.

La municipalité y a installé l’hôtel de ville en 1973. Un parc, orné de plusieurs sculptures du Cessonnais Jean Boucher, s’étend sur 4 hectares dans le prolongement du manoir. Il a été classé par le ministère de l’Environnement en 1992.

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