Les ponts de Cesson : le pont de Sévigné

Article de Denis BAHON.

sevigne120313aLouis, René, François Duparcqporée, Conseiller du Roy et avocat général au Parlement de Bretagne, Seigneur de Brays, a adressé une plainte probablement vers 1785 aux Commissaires des Etats de Bretagne, pour les préjudices et dommages causés à ses terres par la reconstruction du pont sur la route de Rennes.

Avant 1736, le grand chemin qui partait de Rennes passait à la gauche du bourg de Cesson, empruntait les vieux ponts et poursuivait vers Grippé en longeant le portail de Champagné à travers les terres de la ferme des Linais, qui dépendait de Brays.

En 1736, le Parlement de Bretagne décida d’abandonner cet itinéraire en traçant une ligne droite depuis Rennes qui évitait le bourg de Cesson. Cette décision nécessitait la pose d’un pont à deux arches pour un montant de 6393 livres achevée en deux années. (Michel Guerro in Bulletin et Mémoires de Cesson Mémoire et Patrimoine tome II 2005). Le chemin, se plaint le Seigneur de Brays, passe sur une dizaine de pièces de terre qui rapportaient près de 100 charretées de foin chaque année, depuis un champ dénommé jadis « les Pâtissiaux » et rebaptisé « parcelle du Pont ».

Malheureusement, l’ouvrage, édifié par le Sieur Loiseleur, ingénieur de son état, menaça ruine en 1776 ou 1777. Il fallut l’étayer pour combattre l’ouverture des voutes avant de prendre la décision de le reconstruire. En 1781, les travaux sont adjugés pour un montant de 60.750 livres à Julien Hedeux, entrepreneur à Rennes (Michel Guerro, ouvrage cité ci-dessus). Le pont est rapproché vers Rennes de 30 à 40 toises. Il fallut même détourner le cours de la Vilaine pour qu’elle puisse passer sous le pont et de plus pour éviter l’arrêt du trafic routier, construire un pont provisoire sur la parcelle des Pâtissiaux ou parcelle des Ponts laquelle servit même à l’édification temporaire d’un atelier et d’une maison pour l’ingénieur. Les matériaux et le sable y furent déposés et cette parcelle fut transformée en dépôt pendant plusieurs années. D’où l’impossibilité pendant cette période de cultiver ces terres et d’en tirer le moindre revenu. Le préjudice s’étendait aux petits prés vers le bourg de Cesson le long du détournement de la rivière.

sevigne120313cEn 1783, rappelle Michel Guerro, un incident majeur conduit l’ingénieur en prison pour négligence : « Un marchand de bois d’Acigné choisit d’acheminer ses troncs jusqu’à Rennes par flottage sur la Vilaine. Les billes de bois sont bloquées par les arches du pont et occasionnent de sérieux dégâts à l’ouvrage. Il faut dépêcher en urgence un autre ingénieur. Dans son rapport, il note : « …la diligence de Rennes est arrivée ; j’ai voulu l’empescher de passer, mais le conducteur a prétendu que le pont n’avait pas changé de situation et qu’il n’y avait pas de risque, il a déchargé sa voiture et a passé devant moi sans que le pont ait essuyé le moindre ébranlement…le fourgon de Paris pour Rennes est arrivé avec une autre voiture et en même temps trois rouliers sortant de Rennes….le premier charriot chargé de 9.000 livres et attelé de neuf chevaux ce qui faisait plus de 12.000 livres s’est enfilé sur le pont et à peine a-t-il été au milieu que le pont s’est écroulé de toutes parts. Le conducteur a eu heureusement le temps de gagner l’autre rive, mais ses chevaux s’étant empestrés dans leurs traits, sans qu’il ait été possible d’en approcher pour les couper, les trois devant se sont noyés… ».

L’entrepreneur est libéré pour lui permettre de poursuivre son chantier qui emploie 130 ouvriers. Le pont est réceptionné en Mars 1785 (Michel Guerro opus cité).
Les inondations spectaculaires du Bourg en 1966 et 1974 obligent les pouvoirs publics à réaménager le Cours de la Vilaine et un autre pont est construit en 1977 vers Grippé (Michel Guerro).

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